L'homme au grand savoir et l'enfant
Nèg Save, un homme au grand savoir, parcourait le pays, offrant trois sacs d'argent à celui qui lui poserait des énigmes qu'il n'arriverait pas à résoudre. Il tombe, un jour, sur un jeune garçon qui jouait devant la case de ses parents.
- Papa n'est pas là, manman non plus, mais moi je peux te poser des énigmes, dit l'enfant.
- Pas de problème, répond Nèg Save, mais où est donc ta mère?
- Manman est allée chercher ce qu'elle n'a pas semé.
- Et ton père?
- Il est allé ouvrir un trou pour en boucher un autre, mais le trou reste béant.
- As-tu un frère et où est-il?
- Mon père a envoyé mon frère à la chasse en lui recommandant d'abandonner tout le gibier qu'il trouvera ; tout ce qu'il ne trouvera pas, il le rapportera.
Nèg Sav n'en croyait pas ses oreilles et il en avait le bec cloué. Il remet les trois sacs d'argent à l'enfant qui, après les avoir mis à l'abri, lui propose de lui donner les réponses qu'il n'a pas su trouver.
- Tu m'as demandé où était ma mère? Elle est allée chercher ce qu'elle n'avait pas semé. Manman est une matrone qui aide les mères à mettre leur petit au monde mais qui n'est jamais présente lorsqu'elles les conçoivent.
- Et ton père?
- Papa est allé ouvrir un trou pour en boucher un autre, mais le trou reste béant. Il a été emprunter des sous pour rembourser quelqu'un mais, en vérité, il est toujours endetté.
- Ça c'est bien vrai. Dis-moi, ton frère?
- Mon frère avait beaucoup de chiques aux pieds. Alors papa l'a envoyé à la rivière pour s'en débarrasser mais il a rapporté toutes celles qu'il n'avait pas vues. Voilà pourquoi je t'ai répondu qu'il avait envoyé mon frère à la chasse en lui recommandant d'abandonner tout le gibier qu'il trouvera ; tout ce qu'il ne trouvera pas, il le rapportera.
- Pour être fort, tu es fort en vérité, trois fois s'exclama Nèg Save en réalisant que l'enfant était peut-être bien, bien, bien plus fort que lui en matière d'énigmes.
Le soir, à leur retour, le père et la mère de l'enfant, en écoutant les exploits du jour et en découvrant les trois sacs d'argent, furent convaincus que leur plus grand bonheur n'était pas tant de posséder trois sacs d'argent que d'avoir un fils plein d'esprit.