Araignée et Serpent
Kric - krac
Messié kric - messié krac
L’histoire que je vais vous raconter s’est passée il y a bien longtemps de cela. A cette époque, dit-on, tous les animaux savaient parler.
Il n'avait pas plu durant toute cette année-là. Le paysage offrait un spectacle misérable. Les rivières, les criques, les pripris étaient asséchés. Les animaux mouraient de faim et de soif. Ils n'avaient plus de force et se terraient dans leur abri.
Un jour, Anansi l'araignée découvrit, lors de sa quête alimentaire, un immense abattis planté d'ignames. Il y en avait à perte de vue. Comme elle ne vit personne aux alentours, elle, si maligne, décida de les voler. Elle remplit donc son katourido de ces beaux légumes.
Sur le point de s'en aller, Serpent montra sa tête, tira sa fine langue et lui dit d'un ton grave:
« Voleuse, tu as pris mes ignames sans mon autorisation, je vais te mordre.
- Non, dit Anansi, non, laisse-moi amener les ignames à ma famille qui meurt de faim. Tu viendras me mordre demain au petit matin.»
Serpent consentit car il était plus bête que méchant. Puis, il s'en alla. A peine Anansi avait-elle parcouru la moitié du chemin qui conduisait chez elle, qu'elle rencontra Maïpouri, le tapir. Celui-ci avait tellement faim et soif que sa langue pendait jusqu'au sol.
« Tu es en bien mauvais état, Maïpouri, dit Anansi. Viens à la maison, j'ai un katourido plein d’ignames. Nous les cuirons et nous mangerons.»
Maïpouri accepta l'invitation sans se faire prier et suivit Araignée. Ils firent cuire une grande chaudière de légumes et tous se régalèrent. Au moment de se séparer, Anansi dit à Maïpouri:
« Mon ami, puisqu'il est si tard, reste dormir avec nous. Il y a un lit près de l'entrée, couche- toi et si tu entends cogner à la porte, tu ouvriras.»
Au petit matin, Maïpouri, tout endormi, entendit: « Toc! Toc! Toc!» À la porte. Il s'empressa d'ouvrir. Dès que celle-ci s'ouvrit, Serpent, sans regarder plongea la tête, piqua le tapir, et s'en alla. Maïpouri tomba raide mort au sol.
Anansi ne perdit pas de temps, elle découpa le tapir, en sala une moitié, en boucana le reste. Elle en fit maintes préparations: Maïpouri en colombo, rôti, fricassées. Lorsque que le dernier morceau fut mangé, Araignée retourna sur l'abattis de Serpent. Les ignames étaient encore plus belles, plus appétissantes. Elle en remplit un plein katourido. Mais Serpent veillait.
Il allait se jeter sur Anansi lorsque cette dernière lui dit: « Non, non, pas maintenant, laisse-moi amener les ignames chez moi. Tu viendras me mordre demain au petit matin.»
Serpent consentit car il était plus bête que méchant. Puis, il s'en alla.
Sur sa route, Anansi rencontra Tatou qui ne tenait plus sur ses pattes tellement la faim le torturait. Elle lui dit: « Oh! J'ai peine à te voir Tatou, viens à la maison, j'ai un katourido plein d'inagmes. Nous les cuirons et nous mangerons.»
Tatou suivit péniblement Anansi.
Après avoir bien soupé, Tatou, le ventre tellement plein se coucha près de la porte et s'endormit aussitôt. Anansi pensa tout de suite à l'arrivée de Serpent au petit matin. Elle aura de quoi accompagner ses ignames pendant quelques jours.
Au petit jour, Araignée entendit cogner à la porte, elle appela Tatou. Mais personne ne répondit. Elle sortit de son lit et vit un grand trou près de la porte. Elle comprit tout de suite que Tatou était parti dans la nuit. Serpent, impatient, cogna de nouveau. Anansi, dans une réflexion rapide, fit un grand « boum» sur son tambour qui fit trembler toute la case.
« Qui a fait ça, crie-t-elle? Serpent, c'est toi qui as fait ce gros pet?
- Ce n'est pas moi, dit Serpent d'une voix à peine audible. Ce n'est pas moi!
- Si, c'est toi, dit Anansi. Depuis quand parle-t-on avec le ventre? Les gens bien élevés parlent avec leur bouche.
- Je te jure, Anansi, ce n'est pas moi qui ai fait cela. J'ai trop de respect pour toi.
- Oui, c'est toi-même, se mit à hurler Anansi.»
Serpent eut peur. D'une voix tremblante il dit à Anansi: « Anansi, ouvre la porte, j'ai besoin de te parler. Je te jure que je n'y suis pour rien.»
Araignée ouvrit la porte d'un seul coup, Serpent entra. Anansi la rusée se mit à l'écart.
« Si ce n'est pas toi, tu n'as aucune crainte à avoir de mon sabre, dit Anansi. Mets ta tête sur ce billot. Les gens qui ne mentent pas ne meurent pas.»
Serpent posa sa tête sur le billot. D'un coup de sabre, d'un seul, Anansi le décapita.
Tout de suite après, elle fit savoir, au tambour, à tous les animaux de la forêt, que Serpent était mort et qu'on pouvait aller sur son abattis prendre des ignames. Tout le monde eut à manger jusqu'à l'arrivée de la pluie.
Kric - krac
Messié kric - messié krac